L'Évaluation quantitative des impacts sur la santé (ÉQIS) est une méthode formalisée visant à illustrer l'influence sur la santé d'un déterminant de santé donné, en s'appuyant sur l'état de l'art des connaissances scientifiques et sur des données et des scénarios d'évolution locaux. Elle a été largement appliquée à la pollution de l'air et a été plus récemment étendue à d'autres déterminants environnementaux comme le bruit. Cette étude pilote propose des méthodes reproductibles pour réaliser des ÉQIS de la présence d'espaces verts, de l'activité physique induite par les mobilités actives, de la chaleur, de la pollution de l'air ambiant et du bruit. Elle compare la situation actuelle pour ces déterminants à des situations théoriques scénarisées d'évolution de ces déterminants. L'objectif principal était de tester la pertinence et la faisabilité de telles ÉQIS. Une attention particulière a été apportée à la cohérence des approches utilisées pour chaque déterminant, afin d'obtenir des estimations cohérentes des bénéfices attendus sous différents scénarios d'évolution de ces déterminants. La méthode a été testée avec la Métropole Européenne de Lille, Montpellier Méditerranée Métropole, et la Métropole Rouen Normandie, en s'appuyant sur les données existantes pour ces territoires. Des échanges réguliers avec les métropoles ont permis d'affiner le protocole, d'identifier les données disponibles et les informations contextuelles utiles, et de préciser les scénarios. Cette dynamique de co-construction visait à répondre au mieux aux attentes des métropoles, tout en respectant les contraintes méthodologiques de l'ÉQIS. Pour tous les déterminants, les ÉQIS sont pertinentes et faisables, mais avec des points d'attention concernant principalement la construction des scénarios et le choix des relations expositions-risques. Ces points sont particulièrement sensibles pour les ÉQIS espaces verts et mobilités actives, où des hypothèses importantes interviennent pour transcrire les scénarios en équations. Pour la pollution de l'air et le bruit, le choix des relations expositions-risques demeure la principale source d'incertitude. Pour la chaleur, l'échelle d'analyse est le facteur le plus limitant pour développer des scénarios. Par ailleurs, il n'a pas été possible de tester des scénarios d'intervention influençant simultanément plusieurs déterminants car les données environnementales nécessaires n'étaient pas disponibles. Les résultats soulignent que des interventions visant à augmenter le nombre d'espaces verts urbains, promouvoir les mobilités actives, améliorer la qualité de l'air, et réduire le bruit et la chaleur en ville se traduiraient par des bénéfices importants pour la santé, en termes de mortalité, de morbidité, de recours aux soins et de gêne. Ces bénéfices seraient plus marqués pour les populations les plus défavorisées. L'ÉQIS apparaît comme un outil pertinent pour mieux prendre en compte les conséquences sur la santé de déterminants environnementaux urbains. Pour faire progresser les futures ÉQIS, la recherche devrait se concentrer sur la construction de relations expositions-risques adaptées au contexte français. Ces relations devraient utiliser des métriques environnementales facilitant la construction de scénarios utiles pour l'action locale. Il faut par ailleurs promouvoir la production de données environnementales croisées de manière plus systématique, par exemple en modélisant les impacts d'une politique de mobilité en termes de part modale mais également de bruit, de pollution de l'air, d'îlot de chaleur urbain et d'opportunité de végétalisation. De telles données faciliteraient la réalisation d'ÉQIS et une approche systémique de la santé urbaine.
Auteur : Pascal Mathilde, Lagarrigue Robin, Corso Magali, Stempfelet Morgane, Medina Sylvia, Wagner Vérène, De Crouy Chanel Perrine, Blanchard Myriam, Cochet Amandine, Ponties Valérie
Année de publication
: 2024
Pages : 128 p.
Collection : Méthodes