COVID-19 : études pour suivre la part de la population infectée par le SARS-CoV-2 en France

Santé publique France conduit depuis mars 2020 des études de séroprévalence à partir de prélèvements sanguins réalisés en laboratoires de biologie médicale afin d’estimer et de suivre la proportion de personnes ayant été en contact avec le virus SARS-CoV-2, responsable du COVID-19 et ayant développé des anticorps. 

Publié le 22 avril 2020

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Dans cet article

Pour suivre l’ampleur et le cours de l’épidémie de COVID-19, il est essentiel de connaître la proportion de personnes au sein de la population générale qui ont développé des anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 et qui pourraient ainsi être immunisées. La surveillance basée sur les cas confirmés de COVID-19 ne détecte que les personnes qui se sont faites tester et capte difficilement les cas qui ne développent que peu ou pas de symptômes de l’infection. C’est pourquoi Santé publique France mène, en collaboration avec le Centre national de référence des virus des infections respiratoires (dont la grippe) de l'Institut Pasteur et les laboratoires Cerba et Eurofins Biomnis, plusieurs études de prévalence des anticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 au sein de la population française. Ces études sont réalisées en plusieurs vagues à des moments clefs de l’épidémie.

Objectifs

Les résultats permettent de connaître la part de la population qui a été exposée au virus et a développé des anticorps contre le SARS-CoV-2, et plus précisément de :

  • mieux connaître l’ampleur de l'épidémie au niveau national et régional, 
  • mieux suivre, évaluer et communiquer sur la progression de l’épidémie de COVID-19, 
  • mieux orienter et adapter les stratégies de prévention.

Méthode

La surveillance sérologique se base sur l’analyse des « fonds de tubes » issus de prélèvements sanguins effectués en laboratoires de biologie médicale privés ou publics dans le cadre d’un examen de biologie spécialisée autre que la recherche du SARS-CoV-2 (examens réalisés par les laboratoires Cerba ou Eurofins Biomnis).

Ces « fonds de tubes » sont tirés au sort par sexe, par tranche d’âge de 10 ans et par grandes zones géographiques de France métropolitaine, en respectant la distribution de la population générale selon les données de l’Insee au 1er janvier 2020. L’ensemble des « fonds de tubes » en provenance des départements d’Outre-Mer sont en revanche inclus dans l’étude, en raison d’un effectif de taille réduite ne permettant pas l’échantillonnage comme en métropole. Ces prélèvements permettent de couvrir la population, adultes et enfants, de l’ensemble des régions françaises, quels que soient l'âge et le sexe. Le département de Mayotte a été exclu des analyses en raison d’un nombre de prélèvements insuffisant. Les « fonds de tubes » échantillonnés sont rendus anonymes avant leur transmission au CNR, ce qui ne permet pas de rendu de résultat individuel.

Tous les prélèvements sont testés par trois techniques sérologiques mises au point à l’Institut Pasteur de Paris : 

  • Deux tests LuLISA (Luciferase-Linked Immunosorbent Assay) qui ciblent les immunoglobulines (Ig) G dirigées contre la protéine N et la protéine S du virus SARS-CoV-2. Ce test permet d’estimer la proportion de personnes qui ont été en contact avec le virus.
  • La pseudo-neutralisation qui utilise des pseudovirus portant à leur surface la protéine S du virus. Ce test permet d’estimer la proportion de personnes ayant développé des anticorps neutralisants susceptibles de conférer une protection contre l’infection quel que soit leur type (IgG, IgM, IgA).

Résultats à 1 an de surveillance sérologique

Une progression de séroprévalence modérée au cours des deux premières vagues épidémiques

Pendant la première année de circulation épidémique du SARS-CoV-2 en France, cinq enquêtes ont été menées, basées sur la collecte d’environ 3500 prélèvements chacune. Trois enquêtes1 ont été menées avant, pendant et après le confinement national du 17 mars au 11 mai 2020, en semaines 11-2020 (9-14 mars), 15-2020 (6-12 avril), et 20-2020 (11-17 mai 2020). Deux enquêtes, en semaines 41-2020 (5-11 octobre 2020) et 06-2021 (8-14 février 2021), englobent la deuxième vague épidémique du dernier trimestre 2020 et la période de fêtes de fin d’année.

Au cours de la première vague épidémique, nos enquêtes ont mis en évidence une augmentation de la séroprévalence nationale de 0,4% [intervalle de crédibilité à 95%: 0,1–0,9] mi-mars, à 4,1% [3,3–5,0] mi-avril et 4,9% [4,0–5,9] mi-mai 2020. La séroprévalence nationale est passée de 9,0 % [6,9 -11,0] à 13,2 % [10,8-15,6] au cours de la seconde vague, pour un total de 8 832 000 [7 217 000-10 426 000] personnes séropositives à l’issue des fêtes de fin d’année 2020.

Les enfants de moins de 10 ans moins touchés

L’infection a progressé dans toutes les classes d’âge, avec en S6-2021 les séroprévalences les plus élevées parmi les personnes de 20 à 59 ans (autour de 14%) et chez les plus de 80 ans (13,2 %). La séroprévalence est restée la plus faible chez les enfants de moins de 10 ans avec 10,6 % à la fin de la période d’étude. 

Estimations de séroprévalence des infections à SARS-CoV-2 par âge en semaines 41 (05-11 octobre 2020) et 6 (8-14 février 2021), France*
Estimations de séroprévalence des infections à SARS-CoV-2 par âge en semaines 41 (05-11 octobre 2020) et 6 (8-14 février 2021), France

Une épidémie plus intense à l’est de la France et dans les régions ultramarines

Les estimations de séroprévalence régionales ont confirmé que l’Est de la France métropolitaine a été plus touché que l’Ouest, ce qui a également été observé par les données d’incidence, d’hospitalisation et de mortalité.

A l’issue de la première vague de l'épidémie, si la diffusion du SARS-CoV-2 était déjà généralisée à l’ensemble des régions, elle était maximale en Île-de-France (8,8 %) et dans le Grand Est (8,6 %). Les estimations régionales de séroprévalence du SARS-CoV-2 de l’ensemble des enquêtes sont disponibles sur notre plateforme cartographie Géodes.

Après la 2nde vague de l’épidémie métropolitaine, en S6-2021, l’Île-de-France est restée la région la plus touchée en 2021 avec 20,6% de séroprévalence, suivie de la Bourgogne-Franche-Comté (18,7 %) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (13,9 %) où la circulation virale a été particulièrement active fin 2020. 

Dans les départements et régions d’Outre-Mer, la situation est plus contrastée dès la première vague épidémique avec des prévalences variant entre 2,40 % en Martinique et 7,14% en Guyane. Au début de l’année 2021, les niveaux ultramarins de prévalence étaient plus élevés en Guyane (33 %) et Guadeloupe (18,5 %) qu’en Martinique (8,6 %) et à La Réunion (6,3 %).

Estimations de séroprévalence (%) des infections à SARS-CoV-2 par région, semaine 6 de 2021 (8 au 14 février), France*
Estimations de séroprévalence (%) des infections à SARS-CoV-2 par région, semaine 6 de 2021 (8 au 14 février), France

Dès la fin de la première vague épidémique, parmi les personnes infectées, 2,58% [2,16−3,17] ont été hospitalisées pour COVID-19, et 0,49% [0,41−0,60] ont dû être prises en charge en soins intensifs pour leurs infections. 0,84% [0,70−1,03] des personnes infectées par le virus en France en sont décédées dont les 2/3 en établissement sociaux et médico-Sociaux dont les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes - Ehpad)1.

Poursuite de la surveillance en 2021

Après un an de surveillance de la prévalence des infections à SARS-CoV-2 dans la population française, nous avons démontré que l’immunité acquise lors des vagues épidémiques reste limitée bien que de tensions hospitalières majeures aient été observées.

Seule la vaccination de masse permettrait donc d’atteindre rapidement un niveau d’immunité collective susceptible d’impacter favorablement le cours de l’épidémie et de prévenir la saturation des services hospitaliers.

Santé publique France continue de mesurer périodiquement le niveau de prévalence et d’immunité de la population française en 2021 en prenant en compte la montée en charge de la vaccination, le potentiel déclin des anticorps, et la diversité des souches circulantes.  

1Le Vu, S., Jones, G., Anna, F. et al. Prevalence of SARS-CoV-2 antibodies in France: results from nationwide serological surveillance. Nat Commun 12, 3025 (2021).

Les modalités de cette étude sont mises en œuvre en application des dispositions des articles L. 1413-7, L. 1413-8 du code de la santé publique, dans le respect des procédures de réutilisation à des fins scientifiques par des tiers, des prélèvements analysés et conservés à cette fin par Eurofins Biomnis et Cerba.