Consommation d’antibiotiques et prévention de l’antibiorésistance en France en 2021 : où en sommes-nous ?

A l’occasion de la semaine mondiale pour un bon usage des antimicrobiens et de la journée européenne d’information sur les antibiotiques, Santé publique France et ses partenaires publient les données annuelles de la consommation et de la résistance aux antibiotiques, ainsi que les pistes d’actions pour l’avenir dans une approche ‘une seule santé’.

Publié le 18 novembre 2022

Chaque année, à l’occasion de la journée européenne d’information sur les antibiotiques du 18 novembre, les acteurs engagés dans la prévention de la résistance des bactéries aux antibiotiques (ou antibiorésistance) publient un état des lieux de la consommation des antibiotiques et de l’antibiorésistance, en santé humaine, animale et dans l’environnement en France.

Cette synthèse met en perspective les consommations d’antibiotiques en santé humaine et en santé animale et leur évolution. Ainsi, on observe en parallèle une diminution régulière des prescriptions en santé humaine et la réduction de l’exposition des animaux aux antibiotiques. En santé humaine comme en santé animale, les indicateurs de consommation des antibiotiques critiques sont en baisse.

Concernant la résistance des bactéries aux antibiotiques, l’indicateur commun de la résistance des souches d’Escherichia coli aux céphalosporines est en diminution, en santé humaine, en ville, en établissements pour personnes âgées dépendantes et en établissements de santé ainsi qu’en santé animale.

Les actions de prévention de la résistance des bactéries aux antibiotiques sont construites selon l’approche « Une seule santé ». La stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l’antibiorésistance en santé humaine renforce encore les actions pour le bon usage des antibiotiques, la prévention et le contrôle des infections. Elle définit pour la santé humaine des indicateurs prioritaires et des valeurs cibles à atteindre d’ici 2025.
Au fil des années, des succès ont été enregistrés, plus marqués en santé animale, mais doivent être maintenus. Les actions se développent également dans le domaine de l’environnement.

Une cartographie de l’ensemble des dispositifs de surveillance de l’antibiorésistance, l’analyse des freins et des motivations à la mise en place de ces collaborations et leur évaluation ont permis d’identifier des pistes d’amélioration dans une perspective de surveillance intégrée « Une seule santé ». Une douzaine de recommandations portées par l’Anses et Santé publique France ont ainsi été émises et seront publiées en 2023.

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Prévention de la résistance aux antibiotiques : une démarche « Une seule santé »

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Consommation d’antibiotiques et résistance bactérienne aux antibiotiques en France : points clés 2021

  • En santé humaine, 93 % des antibiotiques ont été dispensés en médecine de ville et 7 % en établissements de santé ; parmi ceux dispensés en ville, environ 15 % relèvent d’une prescription hospitalière.
  • La consommation d’antibiotiques en secteur de ville a enregistré en 2021 une reprise de 5 % en Doses Définies Journalières (DDJ) et de 6 % en nombre de prescriptions par rapport à 2020, parallèlement à l’abandon progressif des mesures barrières, la reprise de la circulation des infections hivernales courantes et des consultations médicales.
  • La France reste parmi les pays européens les plus consommateurs d’antibiotiques (4e rang depuis 2018) selon les données de la surveillance ESAC-Net. Il est donc primordial de continuer à promouvoir et d’amplifier les actions en faveur d’un bon usage des antibiotiques auprès de tous les acteurs concernés : citoyens, patients, professionnels de la santé humaine et animale, et décideurs.
  • La résistance bactérienne chez les entérobactéries, en particulier chez Escherichia coli, semble s’inscrire à la baisse en 2021 pour ce qui est de la résistance aux céphalosporines de 3e génération, mais sur plusieurs années l’évolution est fluctuante. Ceci souligne l’importance de maintenir un haut niveau de prévention des infections à bactéries résistantes dans les trois secteurs de soin : ville, Ehpad et ES.

Antibiorésistance en santé humaine : quelle est la situation actuelle après l’épidémie de COVID-19 ?

Après une chute en 2020, les prescriptions d’antibiotiques en médecine de ville sont en hausse

Malgré une baisse continue depuis 10 ans de la consommation d’antibiotiques en ville, la France reste le 4e pays européen le plus consommateur derrière la Grèce, la Roumanie et la Bulgarie. 

Après une baisse accélérée des prescriptions et de la consommation en 2020, concomitante aux mesures de gestion de l’épidémie de COVID-19 (confinements, adoption de gestes barrière, baisse des consultations médicales), l’année 2021 s’est accompagnée d’une reprise des infections hivernales courantes, des consultations médicales et des prescriptions d’antibiotiques, particulièrement au dernier trimestre. 

Environ 80% des prescriptions d’antibiotiques s’est faite en soins de ville, comme habituellement, avec un pic en fin d’année dû aux retours des maladies hivernales.  

Cette reprise concerne toutes les classes d’âge jusqu’à 64 ans mais l’évolution la plus importante des prescriptions et consommations d’antibiotiques est observée chez les enfants âgés de 0 à 4 ans : elles ont augmenté pour revenir quasiment au même niveau qu’en 2019, avant la pandémie de COVID-19.

Fig - Prescriptions d'antibiotiques par classes d'âge et pour toute la population. France, santé humaine, 2011-2021
Fig - Prescriptions d'antibiotiques par classes d'âge et pour toute la population. France, santé humaine, 2011-2021

Mais la consommation d’antibiotiques continue à baisser en 2021 pour les résidents en Ehpad sans pharmacie à usage intérieure

Pour la 1ère fois, les données concernant les résidents en Ehpad sans pharmacie à usage intérieur (PUI) qui font l’objet d’un remboursement individuel par l’Assurance maladie (consommation et durée d'hébergement) ont été extraites. Elles ont permis de produire des indicateurs spécifiques aux résidents en Ehpad sans PUI (84% en 2015) pour la période 2015-2021.

Entre 2015 et 2021, la consommation d'antibiotiques dans les EHPAD sans PUI est orientée à la baisse et, comme dans le secteur de ville, une très forte diminution a été observée en 2020.

La consommation a continué de diminuer en 2021 ( 10,3 en DDJ et -9,6% en prescriptions). Les protocoles mis en place pour assurer la protection des résidents n'ont été assouplis qu'en mai puis en août 2021, et l'ensemble des gestes barrières a continué à être respecté, notamment le port du masque en intérieur.

Consommation d’antibiotiques en établissements de santé : une progression des antibiotiques à large spectre

En établissements de santé (ES), où prêt de 20% des antibiotiques sont prescrits, la consommation d’antibiotiques (exprimée en DDJ) mesurée par la mission SPARES, est plus faible qu’en 2020, avec notamment des consommations plus faibles de macrolides et de fluoroquinolones. Toutefois, la consommation d’autres antibiotiques considérés comme à large spectre par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) – par exemple les céphalosporines de 3e génération, les carbapénèmes et les antibiotiques actifs contre les staphylocoques résistants à la méticilline) – a progressé. 

Infections à entérobactéries résistantes aux antibiotiques : une vigilance à maintenir

Concernant les entérobactéries trouvées dans les infections urinaires, chez les patients de ville et hébergés en Ehpad, les résultats rapportés par la mission Primo sont mitigés. 

Chez les patients à domicile

Pour les souches de E. coli isolées de prélèvements urinaires chez les patients vivant à leur domicile, la résistance aux céphalosporines de 3e génération diminue depuis 2015, mais la résistance aux fluoroquinolones augmente depuis 2019). En 2021, elles continuent évoluer selon ces tendances. 

Chez les résidents en Ehpad

Pour les souches de E. coli isolées de prélèvements urinaires chez des résidents d’Ehpad, la résistance est globalement plus élevée que pour les patients vivant à domicile. La résistance aux céphalosporines de 3e génération est fluctuante depuis 2011. En 2021, elle est en diminution par rapport à 2020 et 2019, mais est plus élevée qu’en 2011. La résistance aux fluoroquinolones était en diminution plus ou moins marquée depuis 2013. En 2021, elle augmente. 

En établissements de santé

En 2021, la résistance aux antibiotiques mesurée par la mission SPARES, notamment chez les entérobactéries, est revenue à un niveau similaire à 2019. Néanmoins, le nombre de signalements externes d’infections/colonisations à bactéries hautement résistantes émergentes (BHRe) reste inférieur à ce qu’il était en 2019, faisant craindre une sous-déclaration et une baisse des dépistages dans le contexte pandémique, avec un risque de diffusion à bas bruit de ces bactéries dans les hôpitaux.

Promise

Cette année, Santé publique France devient membre de Promise. Promise est un méta-réseau en construction, de professionnels de la lutte contre l’antibiorésistance en santé humaine, animale ou dans l’environnement. Il a pour but de favoriser les synergies par la création d’une communauté "One Health" permettant aux réseaux/équipes académiques de partager les meilleures pratiques et leurs expertises, et de coordonner leur action.

Prévention de la résistance bactérienne aux antibiotiques : les outils et les dispositifs mis à disposition du grand public et des professionnels de santé

En santé humaine, un panel d’outils sont à la disposition des professionnels en santé humaine pour la prévention des infections et le bon usage des antibiotiques. Dans le cadre de la stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l’antibiorésistance, Santé publique France, en collaboration avec l’Assurance maladie, ont lancé la campagne ‘les antibiotiques, bien se soigner, c’est d’abord bien les utiliser’. Son objectif : rappeler que les antibiotiques ne sont efficaces qu’en cas d’infections bactériennes et qu’ils doivent être pris uniquement sur avis médical.

En santé animale, les actions de prévention sont portées par les plans Écoantibio qui allient évolution de la réglementation et développement d’outils et d’actions pour soutenir l’engagement des professionnels. L’action conjointe européenne de lutte contre la résistance aux antibiotiques et les infections associées aux soins (EU-JAMRAI) ainsi que la mise en place du méta-réseau Promise piloté par l’Inserm soutiennent le développement d’actions « Une seule santé ».

Exemples d’outils d’aide disponibles

Parmi les nombreux outils mis à disposition, le bon usage des antibiotiques est supporté par des outils d’aide à la prescription tel que « Antibioclic », « Antibiogarde », le « ePopi ».

Le module thématique « Antibio’Malin » a pour objectif d’apporter des informations et conseils pratiques pour tout un chacun sur les infections, le bon usage des antibiotiques et l’antibiorésistance. Il est disponible sur la plateforme internet Santé.fr. 

Le projet éducatif e-Bug propose des outils ludiques et gratuits pour faciliter l’enseignement sur les micro-organismes, la transmission, la prévention et le traitement des infections et l’antibiorésistance aux élèves jusqu’au lycée. 

Des affiches de prévention téléchargeables et disponibles à la commande sont également disponibles.

Suivre l’évolution des indicateurs de l’antibiorésistance avec notre observatoire Géodes

Les indicateurs de consommation d’antibiotiques et de résistance aux antibiotiques en secteur de ville et en établissement de santé sont disponibles, via notre plateforme Géodes. Ils permettent de mieux suivre et comprendre l’évolution des indicateurs de l’antibiorésistance en France grâce à une visualisation interactive et par territoires.

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Voir aussi

En savoir plus sur l’antibiorésistance en France

En savoir plus sur l’antibiorésistance en Europe et dans le Monde

Liens vers les sites internet des organismes et institutions engagés dans la lutte et la prévention de l’antibiorésistance en Europe et dans le Monde.