Nombre de cas notifiés et incidence
En 2016, 1 218 cas de légionellose ont été notifiés en France. Parmi eux, 24 cas étaient des résidents des DOM dont 16 à l’Ile de la Réunion, et 23 étaient des ressortissants étrangers diagnostiqués en France. Le taux d’incidence des cas notifiés de légionellose en France métropolitaine était de 1,8/100 000 habitants (figure 1). Le nombre de cas notifiés en 2016 était inférieur à celui de 2015 où 1 389 cas avaient été notifiés avec une incidence de 2,1/100 000 habitants.

Le gradient géographique Ouest-Est du taux d’incidence des cas notifiés de légionellose était toujours marqué et l’incidence variait de 0,5/100 000 habitants en Bretagne à 4,5/100 000 habitants en Alsace (Figure 2). Le gradient était également marqué en tenant compte des nouvelles régions (Figure 3).


Caractéristiques des cas
L'âge médian des cas était de 63 ans [Min-Max : 17-106 ans] et le sexe ratio homme/femme était de 2,3 (846 hommes et 372 femmes). L’incidence augmentait avec l’âge et les taux d’incidence les plus élevés s’observaient chez les personnes de plus de 80 ans (5,5 / 100 000) (figure 4). Seuls 11 cas n’avaient pas été hospitalisés. La majorité (76 %) des cas était survenue entre les mois de mai et octobre avec une prédominance en juin contrairement à 2015 où le nombre de cas était élevé en août et septembre (figure 5).


77 % des cas (938/1218) présentaient au moins un facteur de risque connu (tableau 1). Le tabagisme était le seul facteur de risque noté pour 33% des cas (11% avaient un autre facteur en plus).
L’évolution de la maladie était connue pour 91 % des cas (1 105/1 218) et la létalité (131 décès) était plus élevée que celle de 2015 (11,9 % versus 9 %, p<0.05).
Le délai médian entre la date des premiers signes cliniques et la date de notification à l’Agence régionale de santé (ARS) était de 6 jours (intervalle inter-quartile [4 - 9]) ; 83 % des cas étaient notifiés dans les 10 jours suivant l’apparition de leurs premiers signes cliniques et 95 % dans les 20 jours. Ces indicateurs annuels sont quasi-identiques depuis 2010.
Informations microbiologiques
Parmi les 1 218 cas, 1 182 (97 %) étaient des cas confirmés et la détection des antigènes solubles urinaires était la principale méthode diagnostique utilisée (1 149 cas, 94,3 %). Une amplification génique (PCR) a été réalisée pour 109 cas (9 %) et pour 32 d’entre eux, la PCR était l’unique méthode de diagnostic biologique (36 en 2015). La proportion de cas diagnostiqués par PCR n’a pas augmenté ces dernières années (Figure 6). La majorité des cas était liés à l’espèce Legionella pneumophila sérogroupe 1 (Lp1) (1168/1218).

Pour 24,7 % des cas (n=300) une souche a été isolée, ce pourcentage était comparable à celui de 2015 (24,8 %). La majorité (99 %=296/300) des souches était L. pneumophila dont 281 Lp1 et 15 appartenant à d’autres sérogroupes. Toutes ont été analysées selon les 3 méthodes de génotypage par le Centre national de référence des légionelles. Parmi les Lp1, 70 (25 %) étaient des souches dites «endémiques»: 29 étaient des souches «Louisa», 18 des souches «Paris», 15 des souches «Lorraine», 6 souches «Biarritz» et 2 «Mondial». Parmi les autres Lp1, 174 (62 %) souches présentaient un profil déjà répertorié dans la base de données du CNR et 37 (13 %) avaient un profil «sporadique» (non encore répertorié). Parmi les 294 cas pour lesquels un sequence type (ST) était disponible, 39 % étaient associés à 8 STs, les ST23, ST1, ST47, ST62, ST259, ST146, ST40 et ST20; les plus représentés étaient le ST23 (41 cas=14 %) et le ST1 (21 cas=7 %). A noter qu’en l’absence d’isolement de souche, un typage génomique «ST» complet a pu être réalisé directement sur prélèvement pour 3 cas.
Pour 37 cas (12 %), la souche d’origine humaine a pu être comparée aux souches environnementales isolées d’un ou plusieurs lieu(x) fréquenté(s) par le malade et pour 21 des 39 (54 %) comparaisons (2 cas avec 2 comparaisons), les profils génomiques des souches se sont révélés identiques. Pour ces cas, les investigations environnementales et microbiologiques ont permis de préciser que les réseaux d’eau sanitaire étaient la source la plus probable de contamination dans 8 établissements de santé, 4 maisons de retraite, 6 domiciles et 3 autres établissements publics.
Expositions à risques
Une exposition à risque lors de la période d’incubation (2-10 jours) était rapportée pour 460 cas (38 %) (Tableau 2) proportion moindre qu’en 2015 (38 % versus 42 % p<0.04). La part des cas qui avaient séjourné dans un établissement hospitalier pendant la période d’incubation en 2016 (7 %) était comparable à celle de 2015 (8 %). Un peu moins de la moitié de ces cas (37/84) étaient des cas nosocomiaux certains (hospitalisés durant toute la période supposée d’exposition). Les 14 cas ayant fréquenté une station thermale étaient tous des cas isolés. Le mode d’exposition le plus fréquemment rapporté était toujours la catégorie voyage (219 cas) (18 % versus 22 % en 2015 p=0.01). Parmi ces cas, 151 cas ont été notifiés au réseau européen des cas liés au voyage ELDSNet dont 141 cas (12 % de l’ensemble des cas) avaient séjourné dans un hôtel ou camping ; les autres cas notifiés avaient fréquenté des gîtes, des maisons d’hôtes ou des locations disponibles par internet. Sur les 151 cas, la moitié (76 cas) avaient voyagé à l’étranger et la plupart en Europe (47/76 = 67 %). Dans la catégorie « autres expositions » 10 patients utilisaient un appareil à pression positive continue pour apnées du sommeil (19 cas en 2015).
En 2016, le réseau européen de surveillance des cas liés aux voyages ELDSNet a signalé à Santé publique France 29 cas supplémentaires à ceux notifiés (59 en 2015). Il s’agit de cas survenus chez des ressortissants étrangers ayant séjourné dans un établissement de tourisme en France dans les 10 jours précédant la date de début des signes et diagnostiqués dans un pays étranger.
Au total, par les notifications des cas français et étrangers, 156 établissements français ont été notifiés par ELDSNet (264 en 2015), 145 pour des cas isolés et 11 pour des cas groupés (défini par ELDSNet comme au moins deux cas ayant séjourné dans un même établissement sur une période de deux ans). Dans ces 11 établissements, la réalisation d’une investigation avec prélèvements d’eau du réseau d’eau sanitaire a permis de révéler la présence de légionnelles au-dessus du seuil règlementaire pour 4 (36 %) d’entre eux.
En 2016, plusieurs investigations de cas regroupés dans le temps et dans l’espace ont été réalisées par les ARS en collaboration avec les Cires. Trois investigations, toutes concernant des cas communautaires, ont fait l’objet d’une information des autorités nationales. Une seule investigation concernait plus de 10 cas et rapportait un excès de cas sur l’Ile de la Réunion où 20 cas avaient été notifiés en 6 mois (versus 2 à 8 cas par an). Aucune source commune de contamination n’a pu être identifiée lors de ces trois investigations.
Conclusion
En 2016, le nombre de cas de légionellose est inférieur à celui de 2015 mais reste relativement stable depuis 2005 variant entre 1200 et 1500 cas. Le taux d’incidence des cas notifiés en France métropolitaine de 1,8 pour 100 000 habitants reste supérieur au taux européen (1,4 pour 100 000 habitants en 2015) mais inférieur à celui des pays voisins (Italie et Espagne) [2]. Le gradient géographique «Ouest-Est» du taux d’incidence des cas notifiés constaté ces dernières années fait l’objet d’une étude multifactorielle étudiant les facteurs météorologiques. Les résultats de cette étude qui vise à expliquer ces disparités d’incidence de la légionellose sur le territoire seront prochainement disponibles. L’ensemble des caractéristiques des cas de légionellose reste stable et la majorité des cas présente des facteurs de risques connus, que ce soit l’âge ou un facteur prédisposant. Comme en 2015, aucun cas chez un enfant de moins de 15 ans a été enregistré au niveau national. La part des expositions à risque rapportées est inférieure à celle de 2015 mais comparable aux années précédentes notamment celle concernant les voyages. Le nombre de cas ayant fréquenté un établissement thermal a plus que doublé par rapport à 2015 mais tous les cas étaient des cas isolés. Les cas liés à l’utilisation d’appareil à pression positive continue pour apnées du sommeil sont moins nombreux qu’en 2015 mais une vigilance quant à l’utilisation de ces appareils selon les préconisations de l’ANSM [3] est à poursuivre en investiguant systématiquement chaque cas concerné par cette situation.
Le faible nombre d’épisodes de cas groupés ayant fait l’objet d’une information au niveau national montre que la réactivité des partenaires impliqués dans la surveillance et la gestion adéquate des épisodes au niveau régional permettent d’en limiter l’ampleur. L’excès de cas sur l’Ile de la Réunion a permis de clarifier les méthodes de diagnostic utilisées et de renforcer la collaboration des différents partenaires impliqués dans la surveillance régionale. Cependant la majorité des investigations n’a pas permis d’identifier les sources de contamination. La documentation des sources de contamination déjà connues ou des nouvelles sources demeure une priorité. Il est indispensable de maintenir la réactivité des partenaires locaux et d’investiguer minutieusement tous les cas groupés mais également de poursuivre la promotion des prélèvements cliniques qui permettent de disposer de souches et d’avoir ainsi une meilleure capacité d’identification de sources de contamination et de documentation des cas groupés.
[2] European Centre for Disease Prevention and Control. Annual epidemiological report for 2015 – Legionnaires’ disease. [Internet]. Stockholm: ECDC; 2017.
[3] Recommandations ANSM , 2016 : http://ansm.sante.fr/S-informer/Points-d-information-Points-d-information/Dispositifs-medicaux-d-assistance-respiratoire-utilises-a-domicile-Recommandations-destinees-aux-patients-Point-d-Information