Avertissement : à compter de l’année 2018, les données sont exprimées en années de survenue de la maladie et non plus en année de déclaration comme c’était le cas auparavant, afin de rendre mieux compte de l’épidémiologie des tularémies en France. Pour cette raison, le bilan sera publié plus tard au cours de l’année n+1, des cas de l’année n étant notifiés habituellement jusqu’à l’été n+1.
Du 1er janvier au 31 décembre 2018, 133 cas de tularémie sont survenus en France et ont été notifiés entre janvier 2018 et juillet 2019. Les données des années 2014 à 2016 suggéraient déjà une augmentation notable du nombre de cas de tularémie survenus et identifiés en France, mais l’année 2017 avait montré un retour à un nombre de cas bien plus faible et comparable aux années antérieures à 2014 (figure 1).
En 2018, un nombre de cas sans précédent est survenu et les caractéristiques des patients étaient sensiblement différentes, justifiant de qualifier l’année d’épidémique.
Nombre de cas déclarés et distribution spatio-temporelle
Le plus grand nombre de cas été observé durant les mois de janvier à juin 2018 (figure 2).
Au plan régional, les régions les plus touchées étaient la Bretagne et les Pays de la Loire qui représentaient 54% de l’ensemble des cas. La Nouvelle Aquitaine arrivait en 3e position (figure 3).
Caractéristiques des patients
Parmi les 133 patients, 103 (78%) étaient des hommes. Les cas étaient âgés de 3 à 91 ans (médiane 54 ans).
Du point de vue clinique, 52 (39 %) patients ont présenté une forme ganglionnaire de tularémie, 36 (27 %) une forme ulcéro-ganglionnaire, 28 (21 %) une forme pleuropulmonaire, 12 (9 %) une forme typhoïdique et 4 (3 %) une forme oro-pharyngée.
Quatre-ving-seize patients (76%) cas avaient présenté de la fièvre et 101 (78%) des adénopathies. Parmi les patients présentant des adénopathies, les ganglions atteints étaient les ganglions inguinaux (n=32), axillaires (n=29), médiastinaux (n=20), épitrochléens (n=15), de la sphère ORL (n=13) et non précisés pour 3. Un patient pouvait présenter plusieurs atteintes ganglionnaires.
Cinquante-et-un cas (40%) ont été hospitalisés. Deux patients sont décédés au décours d’une tularémie pleuro-pulmonaire.
Diagnostic biologique
Le diagnostic biologique de l’infection a été obtenu par sérologie seule pour 85 patients, par amplification génique seule pour 16 patients, par isolement d’une Francisella seul pour 14 patients, par sérologie et amplification génique pour 10 cas, pas sérologie et isolement bactérien pour 3 cas, par isolement bactérien et amplification génique pour 2 cas, et par les 3 techniques pour 1 cas.
Les 20 souches isolées provenaient d’une ponction de liquide de collection (n=7), d’hémocultures (n=6), de prélèvement de lésions cutanées (n=3), de biopsies ganglionnaires (n=2) et d’une ponction de liquide articulaire (n=1). Le prélèvement d’origine de la dernière souche n’était pas précisé.
Expositions à risque
Les expositions à risque recueillies sur la fiche de DO concernent les 15 jours précédant le début des symptômes. Dix-neuf (14%) patients avaient manipulé des lièvres, 8 (6%) des lapins, 6 (5%) un sanglier, 1 (0.7%) des cervidés et 23 (17%) avaient eu un contact volontaire ou accidentel avec des rongeurs ou leurs déjections.
Vingt (15 %) patients rapportaient une morsure de tique.
Vingt-huit (21%) patients rapportaient des expositions professionnelles susceptibles de les exposer à Francisella tularensis (14 dans le secteur agricole, 6 dans le secteur jardinage et paysagisme, 3 travailleurs de la filière bois, 1 zoologiste, 1 dans un lycée agricole, 1 cuisinier préparant fréquemment du gibier et 1 dans un centre équestre).
Quatre-vingt-douze (64%) cas rapportaient des loisirs de plein air. La nature de ces loisirs était renseignée pour 66 cas, principalement la course à pied, trail ou randonnées (16/66), les promenades (15/66), la chasse (15/66), le jardinage (11/66), le VTT (7/66), la pêche (1/66), l’apiculture (1/66) et l’équitation (1/66).
Pour 27 (20 %) cas, sporadiques et résidant en zone rurale, aucune exposition à risque n’a pu être retrouvée par l’interrogatoire et l’origine de leur contamination reste indéterminée.
Conclusion
L’année 2018 est celle ayant compté le plus grand nombre de cas identifiés depuis la mise à DO de la maladie en octobre 2002. Cette année épidémique est marquée par une concentration des cas dans les régions Pays de la Loire et Bretagne, et une modification des caractéristiques des cas identifiés par rapport aux années antérieures avec de plus nombreuses formes pulmonaires et de plus nombreux cas sans exposition à risque retrouvée.
La surveillance ultérieure permettra de vérifier si cette année particulière s’inscrit dans une tendance ou constitue un évènement isolé.