Huit à 11 mois après les attentats de novembre 2015, Santé publique France a lancé, entre le 7 juillet et le 10 novembre 2016, une Enquête de santé publique post-attentats. Cette enquête par web-questionnaire et basée sur une participation volontaire concernait la population dont les expositions répondaient au critère A du trouble de stress post-traumatique (TSPT) tel que défini dans le DSM-5 (exposition à la mort ou à une blessure grave). Ses objectifs étaient d'estimer l'impact psychologique et de mieux connaître l'utilisation des dispositifs de soins et les facteurs associés à cette utilisation. Cet article présente les premiers résultats concernant les membres de la population civile (hors personnel intervenant et soignant) ayant participé à cette enquête. La population concernée a été informée de l'étude via les médias, les associations de victimes, les associations d'aide aux victimes, les relais médicaux volontaires ainsi que grâce à des visites aux cafés et auprès des résidents adjacents aux lieux d'attentats. Les volontaires devaient remplir un questionnaire d'inclusion sur le site Internet de Santé publique France, puis accédaient à un questionnaire épidémiologique. Celui-ci renseignait sur leurs caractéristiques sociodémographiques, leurs antécédents psychologiques, leur exposition aux attaques et à leurs conséquences, leur santé mentale - PTSD Checklist for DSM-5 (PCL-5), Hospital Anxiety and Depression scale (HAD), Prigerson's Inventory of Complicated Grief (ICG) - et leur utilisation des dispositifs de soins médico-psychologiques. L'impact était important, avec un trouble de stress post-traumatique (TSPT) probable pour 54% des menacés directs (directement visés, blessés), 27% des témoins sur place et 21% des témoins à proximité. Pour les endeuillés (c'est-à-dire les personnes ayant perdu une personne qu'elles considéraient comme proche) sans autre exposition, la prévalence du TPST probable était de 54%. Un possible deuil compliqué (score supérieur à 25 au questionnaire de Prigerson) était observé chez 66% de ces endeuillés. Parmi les personnes atteintes d'un TSPT probable, 46% déclaraient ne pas avoir engagé de traitement régulier avec un psychologue ou un médecin. Cette proportion était plus importante pour les témoins sur place et à proximité (63%) et pour les endeuillés non exposés directement (46%) que pour les menacés directs (33%). Ces premiers résultats suggèrent un besoin de renforcer et d'élargir le dispositif d'accès aux soins à moyen terme.
Auteur : Pirard Philippe, Motreff Yvon, Lavalette Céline, Vandentorren Stéphanie, Baubet Thierry, Messiah Antoine
Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2018, n°. 38-39, p. 747-755