Santé publique France assure la surveillance épidémiologique de certaines pathologies en lien possible avec les perturbateurs endocriniens qui s'inscrit dans la Stratégie nationale contre les perturbateurs endocriniens. L'endométriose a été priorisée comme indicateur clé à surveiller sur la base du poids des preuves concernant le lien avec les perturbateurs endocriniens (Le Moal J, Sharpe RM, Jorgensen N, Levine H, Jurewicz J, Mendiola J. Toward a multi-country monitoring system of reproductive health in the context of endocrine disrupting chemical exposure. European journal of public health. 2015). L'endométriose est une pathologie gynécologique fréquente qui se caractérise par le développement de tissu endométrial (endomètre) en dehors de la cavité utérine. L'endométriose peut altérer de manière importante la qualité de vie (saignements, douleurs chroniques invalidantes) et la fertilité. Cette étude a permis de développer pour la première fois en France un indicateur national de surveillance de l'endométriose prise en charge à l'hôpital (tous types d'endométriose), d'en estimer l'incidence de 2011 à 2017 et d'analyser les variations spatio-temporelles du risque. Les données ont été obtenues à partir du Système national de données de santé. Chez les femmes âgées de plus de 10 ans, nous avons observé 207 462 nouveaux cas d'endométriose hospitalisée (environ 29 600 cas/an) avec un taux d'incidence annuel brut d'endométriose hospitalisée dans la période d'étude 2011-2017 de 10/10 000 personnes-années. De 2011 à 2017, le risque d'endométriose hospitalisée tous types chez les femmes de 10 ans et plus a augmenté de 8,5%, et de 10,4% chez les femmes de 25 à 49 ans, qui représentaient 68,3% des cas. Ces résultats peuvent refléter une réelle augmentation d'incidence et/ou l'influence de facteurs modifiés durant la période d'étude : sensibilisation accrue des patientes et des praticiens à la pathologie, recours de plus en plus fréquent à l'imagerie par résonnance magnétique pelvienne pour la détection, évolution des pratiques chirurgicales. Nous avons observé une hétérogénéité géographique du risque d'endométriose hospitalisée, avec des zones de sur-risque dispersées sur le territoire. Cette hétérogénéité pourrait être influencée par des disparités de prise en charge, déterminées par la proximité des domiciles des femmes avec des centres experts ou connus en matière d'endométriose. Il est prématuré à ce stade de discuter d'éventuelles hypothèses environnementales à partir de ces premiers résultats descriptifs, même si une contribution environnementale au risque d'endométriose est plausible au regard de la littérature de plus en plus fournie, notamment concernant le lien avec les perturbateurs endocriniens. Cette étude sous-estime par construction la fréquence réelle de l'endométriose en France. Elle apporte néanmoins une première estimation quantifiée du problème de santé publique lié à l'endométriose, une photographie détaillée de sa prise en charge médicale sur le territoire français, et le nombre de cas d'endométriose hospitalisée souligne l'importance de poursuivre ces travaux en lien avec la Stratégie nationale contre l'endométriose. Il s'agit donc d'une première étape de la surveillance nationale, à enrichir avec d'autres sources de données complémentaires afin d'approcher au mieux l'incidence réelle dans la population, d'approfondir les liens avec l'exposition aux perturbateurs endocriniens, et in fine de pouvoir orienter les mesures de gestion et prévention ainsi que les travaux de recherche sur la thématique. Santé publique France poursuivra cette surveillance de l'endométriose dans le cadre de la surveillance des effets des perturbateurs endocriniens sur la santé dont le périmètre est en cours de priorisation.
Auteur : Le Moal Joëlle, Goria Sarah, Chesneau Julie, Fauconnier Arnaud, Kvaskoff Marina, De Crouy-Chanel Perrine, Kahn Vanessa, Daraï Émile., Canis Michel
Année de publication
: 2022
Pages : 42 p.
Collection : Études et enquêtes