Les phtalates sont des substances chimiques présentes dans de nombreux produits de consommation courante (emballages alimentaires, jouets, revêtements de sol en vinyle, produits cosmétiques, produits d'entretien ménagers, peintures, etc). L'alimentation participerait à 90% de l'exposition totale. L'usage de certains phtalates dans les jouets, les appareils électroniques, les emballages alimentaires, les dispositifs médicaux et les cosmétiques est encadré par la règlementation européenne et française. Les phtalates sont considérés comme des perturbateurs endocriniens et la plupart sont classés comme " substances toxiques pour la reproduction ". Des effets sont suspectés sur le système reproducteur masculin et sur la fonction thyroïdienne. Une exposition prénatale pourrait perturber le développement de certains tissus ou organes, avec des conséquences sanitaires possibles à l'âge adulte voire même après plusieurs générations, par des mécanismes épigénétiques. Dans le cadre du programme national de biosurveillance, l'étude transversale Esteban a permis de mesurer pour la première fois dans la population française continentale les niveaux d'imprégnation à 9 phtalates (DEP, DnBP, DiBP, BBzP, DMP, DCHP, DEHP, DiNP, DnOP) et d'en rechercher les déterminants. La mesure des concentrations urinaires en métabolites des phtalates a été réalisée à partir d'un sous-échantillon de 500 enfants et 897 adultes âgés de 6 à 74 ans, inclus dans l'étude entre avril 2014 et mars 2016. La plupart des métabolites ont été quantifiés dans 80 à 99% des échantillons des adultes et des enfants, exceptés pour le MiNP (< 20%), le MCHP et le MnOP (< 1%). Les plus fortes concentrations ont été mesurées pour le MEP (respectivement, 51,2 et 71,4 µg/g de créatinine chez les enfants et les adultes), le MiBP (respectivement 47,1 et 38,8 µg/g de créatinine) et la somme des métabolites du DEHP (respectivement 27,7 et 22,2 µg/g de créatinine). Les enfants étaient les plus imprégnés, exceptés pour le MEP, marqueur de l'utilisation des cosmétiques et des produits d'hygiène. Les résultats obtenus étaient cohérents et proches de ceux observés dans les pays nord-américains (Etats-Unis, Canada). La recherche des déterminants de l'imprégnation montrait chez les enfants une augmentation des concentrations en métabolites du DnOP et du DEHP avec l'utilisation des cosmétiques et de produits pour cheveux. Chez les adultes, l'imprégnation par les phtalates à chaînes courtes (MnBP, MiBP, MBzP, MEP) était augmentée avec la présence de revêtements en vinyle dans le logement et le fait d'être un fumeur ou un ex-fumeur. Malgré les restrictions d'usage de certains phtalates, les résultats de l'étude Esteban montrent que l'ensemble de la population était exposée à au moins un phtalate à un niveau de concentration urinaire quantifiable. La demi-vie de ces composés étant courte, ce constat démontre que les phtalates continuent d'être omniprésents dans l'environnement et les produits de consommation courante.
Auteur : Balicco Alexis, Bidondo Marie-Laure, Fillol Clémence, Gane Jessica, Oleko Amivi, Saoudi Abdessattar, Zeghnoun Abdelkrim
Année de publication
: 2019
Pages : 52 p.
Collection : Études et enquêtes