Contexte En France, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) sont ajournés de façon permanente du don de sang. Cette mesure, jugée par certains comme discriminatoire, fait l'objet de débats publics. De plus elle n'est pas totalement respectée, car certains HSH ne déclarent pas leurs pratiques sexuelles avant le don. Méthodes Nous avons estimé la part du risque actuel de transmission du VIH par transfusion attribué aux HSH. Nous avons ensuite construit un modèle basé sur des données obtenues à partir d'enquêtes comportementales et épidémiologiques, afin d'évaluer l'impact d'une nouvelle stratégie consistant à n'exclure que les HSH multipartenaires au cours des 12 derniers mois. Résultats Vingt-huit séroconversions VIH sont survenues chez des donneurs réguliers entre 2008 et 2010, représentant un risque de 1 sur 2 900 000 dons. Quatorze séroconversions (50%) concernaient des HSH. Si tous les HSH s'étaient abstenus de donner leur sang, ce risque aurait été de 1 sur 5 700 000 dons, soit la moitié du risque actuel. La nouvelle stratégie se traduirait par un risque global de transmission du VIH de 1 sur 3 500 000 (proche du risque actuel) à 1 sur 700 000 dons (quatre fois plus élevé que le risque actuel). Conclusion Modifier la mesure actuelle d'ajournement des HSH peut augmenter le risque de transmission du VIH par transfusion. Toutefois, le modèle ne prend pas en compte l'amélioration possible de l'observance par les HSH d'une mesure moins stricte qui serait perçue comme plus équitable. À l'inverse, l'assouplissement de cette mesure pourrait encourager certains HSH à se faire dépister à l'occasion d'un don de sang. C'est pourquoi des études qualitatives devraient être mises en oeuvre pour évaluer les motivations des HSH qui donnent actuellement leur sang, malgré la mesure d'ajournement, ainsi que les changements possibles de leur observance d'une nouvelle stratégie. (R.A.)
Auteur : Pillonel J, Heraud Bousquet V, Pelletier B, Semaille C, Velter A, Saura C, Desenclos JC, Danic B
Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2012, n°. 39-40, p. 443-7