Suivi épidémiologique des travailleurs potentiellement exposés à l’incendie industriel des entrepôts de Lubrizol et NL Logistique à Rouen

A partir de mai 2023, Santé publique France met en place un suivi épidémiologique des salariés potentiellement exposés à l’incendie industriel survenu le 26 septembre 2019 sur les sites des entreprises Lubrizol et NL logistique à Rouen.

Publié le 4 mai 2023
Dans cet article

Le 26 septembre 2019, un incendie industriel s’est déclaré dans les entrepôts des entreprises Lubrizol et NL Logistique, situés dans la zone portuaire de Rouen. Les travailleurs présents sur leur lieu de travail, proche de l’incendie ou sous le panache de fumée, ont pu être exposés à ses émissions ou à ses conséquences (stress, dépôts de suie, odeurs...). De nombreuses entreprises et pompiers sont également intervenues sur le site de l’incendie le jour même et jusqu’à la fin du chantier de remédiation. 

Santé publique France a été missionnée par la Direction générale de la santé pour évaluer l’impact sur la santé physique et mentale, des personnes qui ont pu être exposées à un ou plusieurs de ces facteurs de risque sanitaire. La description et l’analyse de leurs perceptions de l’événement, de leurs expositions et des symptômes ressentis, la mesure et la surveillance d’indicateurs de l’état de santé de la population, vont permettre aux autorités publiques de prendre des mesures sanitaires si elles sont nécessaires et d’adapter au mieux la gestion d’autres accidents industriels. 

Dans ce cadre, un ensemble d’études épidémiologiques sont mises en place pour évaluer l’impact sanitaire de l’incendie : le dispositif « Santé post-incendie-76 ». Ce dispositif comprend un volet sur la santé des travailleurs, s’appuyant sur l’expertise pluridisciplinaire du groupe d’alerte en santé travail (Gast) Normandie dont les récents travaux ont préconisé la mise en place d’une surveillance épidémiologique des travailleurs exposés à l’incendie ou à ses suites de façon similaire à celle mise en place pour la population générale à partir du système national des données de santé (SNDS) et des données de carrières issues des caisses de retraites. 

Objectifs

  • Décrire l’état de santé des travailleurs exposés à l’incendie ou à ses suites (dépôt, odeur...), 
  • Et le comparer à des travailleurs référents pour identifier une potentielle augmentation de problèmes de santé.

Ce suivi permettra, s’il existe une variation significative de différents indicateurs de santé, d’éclairer la décision publique dans la mise en place de mesures de prise en charge médicale des populations concernées, de prévention et pour adapter la gestion d’autres accidents industriels..

Population étudiée

Trois groupes de travailleurs d’intérêt sont suivis dans le cadre de cette étude, définis en fonction de critères d’inclusion, suivants :

  • travailleurs intervenus entre le 26/09/2019 et le 30/09/2020 (fin du chantier de remédiation) sur les sites incendiés de Lubrizol et NL Logistique,
  • salariés ayant travaillé entre le 26/09/2019 et le 07/10/2019 dans un établissement situé dans l’une des 119 communes de la zone d’étude globale,
  • salariés ayant travaillé entre le 26/09/2019 et le 07/10/2019 (fin du feu couvant) dans un établissement localisé dans le panache modélisé par l’EQRS et distant de 1,2 km des sites incendiés (zone de proximité).

Le suivi concerne également trois groupes de travailleurs référents, qui permettront de faire des comparaisons. Ils seront comparés aux travailleurs d’intérêt sur plusieurs critères, tels que l’âge, le sexe, l’activité de l’établissement employeur et le département de localisation de l’employeur.

Localisation de la zone d’étude globale et de proximité

La zone d’étude globale comprend 119 communes de Seine-Maritime.

Localisation de la zone d'étude globale
Carte de la zone d'étude globale autour de l'incendie industriel de Rouen
Localisation de la zone d'étude de proximité
Carte de la zone d'étude de proximité autour de l'incendie industriel de Rouen

Déroulement de l’étude

Constitution des groupes de travailleurs

Pour les groupes des travailleurs intervenus sur les sites incendiés et les travailleurs des entreprises situées dans la zone de proximité : les entreprises seront contactées par Ipsos afin de transmettre de façon sécurisée la liste des leurs employés répondant aux critères d’inclusion (voir ci-dessus).

Pour le groupe des travailleurs des autres entreprises situées dans la zone d’étude globale : les travailleurs seront identifiés grâce aux bases de données des caisses de retraite (la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) et la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL)). 

Pour les groupes de travailleurs référents : les caisses de retraite tireront au sort les travailleurs parmi ceux présentant les critères d’appariement précédemment décrits. 

Les différentes listes des travailleurs seront ensuite regroupées par la Cnav.

Collecte des données de santé et de carrière

La Cnav et la CNARCL, pour les travailleurs et référents dont ils ont la responsabilité, transmettront de façon sécurisé la liste des individus avec leurs données de carrières pertinentes à la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) qui gère le système national des données de santé (SNDS). Les données de carrières et de  remboursement de soins seront ensuite pseudo-anonymisées1 avant d’être transmises à Santé publique France via un espace sécurisé. Elles permettront également de construire différents indicateurs de santé respiratoire, cardio-vasculaire ou d’incidence de cancer.

Le SNDS est une base de données médico-administrative qui centralise les données des hospitalisations, des recours au système de soins (consultations, pharmacie…) ayant fait l'objet d'un remboursement par l'Assurance Maladie, quel que soit le régime d'assurance maladie. Il centralise également les informations des affections longues durées et des causes médicales de décès. 

1 La pseudonymisation est un procédé qui consiste à remplacer les données directement identifiantes (nom, prénoms, etc.) d’un jeu de données par des données indirectement identifiantes (alias, numéro séquentiel, etc.). Il permet ainsi de traiter les données d’individus sans pouvoir les identifier (en savoir plus sur le site internet de la Cnil).

Périodes d’étude

La période de suivi débute à la date de l’incendie, soit le 26/09/2019. Trois dates de fin de suivi sont définies selon les évènements de santé à étudier :

  • trois semaines après la fin du feu couvant datant du 07/10/2019, soit entre le 26/09/2019 et le 28/10/2019 (noté court terme),
  • l’année suivant la fin du feu couvant, soit entre le 29/10/2019 et le 07/10/2020 (noté moyen terme),
  • plus d’un an après l’incendie, soit entre le 08/10/2020 et le 07/10/2039 (noté long terme) (avec plusieurs analyses intermédiaires à 5, 10 et 20 ans).

Quand et comment seront disponibles les résultats ?

Les premières analyses sur l’état de santé sont prévues pour être achevées et diffusées un an et demi après l’obtention des autorisations, puis un suivi à long terme sera réalisé en commençant avec un suivi à 5 ans après l’incendie. 

L’ensemble des résultats de la présente étude seront publiés sur le site Internet de Santé publique France. Une restitution des résultats sera faite auprès des parties prenantes locales. Ces résultats pourront également être valorisés par des articles scientifiques.

Garanties relatives au traitement des données

Confidentialité et sécurité des données

Des dispositions spécifiques ont été prises afin de garantir la confidentialité et la sécurité informatique des données recueillies tout au long de l’étude. Les données collectées resteront strictement confidentielles et seront transmises aux seuls agents de Santé publique France habilités, en charge de cette étude. En aucun cas ne seront diffusés des résultats permettant d’identifier directement ou indirectement les participants à l’étude.

Information et droits des travailleurs sur leurs données

Les travailleurs des catégories « travailleurs intervenus sur les sites incendiés » et « travailleurs des entreprises situées dans la zone de proximité » recevront de leurs employeurs une lettre d’information détaillant les modalités de traitement des données ainsi que les droits des participants. Ces informations sont également disponibles dans la note ci-dessous. 

Pour les autres catégories de travailleurs concernés, les modalités de traitements ainsi que les droits sur les données et modalités d’exercice de ces droits par les travailleurs concernés sont détaillés dans la note ci-dessous.

Contrôles et autorisations préalables

Le protocole de cette étude a reçu un avis favorable du Comité éthique et scientifique pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé (Cesrees) le 12 juillet 2022 et une autorisation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) le 26 janvier 2023 (demande d’autorisation n°922234). Ces avis portent notamment la qualité scientifique du projet, sa pertinence éthique et s’assurent des moyens mis en œuvre pour garantir la sécurité et la confidentialité des données personnelles traitées dans le cadre de ce suivi.

En savoir plus

Protocole pour le suivi épidémiologique des travailleurs exposés à l’incendie industriel survenu le 26 septembre 2019 à Rouen

En savoir plus

Partenariats et financement 

Plusieurs organismes interviennent dans la réalisation de ce suivi : 

  • les entreprises propriétaires des sites incendiés (Lubrizol et NL Logistique) pour permettre l’identification des structures intervenues sur les sites incendiés pendant la période définie dans les méthodes,
  • l’organisme collecteur (Ipsos) pour contacter les structures intervenues sur site ou situées à proximité afin de leur présenter la finalité de l’étude et recueillir de façon sécurisée la liste des salariés définis comme exposés,
  • les caisses de retraite (Cnav et CNRACL) en charge, pour leur population respective de bénéficiaires :
    • d’identifier les bénéficiaires définis comme exposés dans la zone d’étude dans son ensemble,
    • d’identifier des référents appariés tel que défini dans les méthodes,
    • d’établir et transmettre de façon sécurisée la liste des individus (exposés et référents) à la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) ;
    • de recueillir les informations professionnelles des exposés et référents,
    • de transmettre, sans information nominative, les informations professionnelles à la Cnam.
  • La Cnam, en tant qu’opérateur central du SNDS, pour :
    • réaliser l’appariement direct des données transmises par la Cnav et la CNRACL avec les données du SNDS,
    • mettre à disposition de Santé publique France un espace sécurisé incluant les données pseudo-anonymisées du SDNS et les données professionnelles transmises par la Cnav et la CNRACL.

Ce suivi est financé par un autofinancement de Santé publique France.

L’étude s’appuie sur un comité d’appui thématique indépendant intitulé : « Evaluation de l’impact de l’incendie des entreprises Lubrizol et NL Logistique sur la santé de la population » mis en place pour appuyer Santé publique France dans le cadre du dispositif SPI76. Il est constitué de personnes qualifiées, externes à Santé publique France.