Au même titre que le logement, la situation socio-économique, les conditions de vie, la pollution et les expositions aux nuisances, l'urbanisme est un déterminant majeur mais largement sous-estimé de la santé des populations. Un urbanisme inapproprié ou délétère dégrade la santé des habitants qui y vivent ; mais des solutions existent, telles que « l'urbanisme favorable à la santé », un concept qui se développe.
L’urbanisme favorable à la santé : encourager les choix qui minimisent l’exposition des populations à des facteurs de risque
L’urbanisme favorable à la santé vise à tenir compte systématiquement des conséquences de tout projet d’urbanisme et d’aménagement sur la qualité de vie, le bien-être, et sur l’environnement. Il s’agit d’encourager des choix qui minimisent l’exposition des populations à des facteurs de risque tels que la pollution de l’air, les nuisances sonores, l’isolement social, etc., et maximisent leur exposition à des facteurs de protection comme la pratique de l’activité physique via les mobilités actives (déplacements non motorisées comme la marche ou le vélo), l’accès aux soins ou aux espaces verts, etc. ; le tout dans une optique de réduction des inégalités sociales et territoriales de santé.
Sept ans après la publication d’un dossier consacré à l’urbanisme et aux aménagements favorables à la santé, ce nouveau numéro de La Santé en action témoigne des avancées et des marges de progrès dans ce domaine. Le contexte a évolué : le changement climatique et ses retombées sur la santé physique, mentale et sur la qualité de vie des populations sont de plus en plus connus et visibles. La reconnaissance des interrelations complexes entre santé humaine, santé animale, santé de l’environnement et des écosystèmes a conduit à la montée en puissance de trois concepts portés par l’OMS : « la santé dans toutes les politiques », « la santé planétaire » et « une seule santé ». Ces démarches sont progressivement intégrées dans les politiques publiques, par exemple en France dans le 4e Plan national santé environnement.
L’urbanisme favorable à la santé : état des connaissances
La partie « État des connaissances » du dossier replace le sujet de l’urbanisme favorable à la santé au sein de ces évolutions et rappelle les synergies entre les actions de santé publique, les démarches de protection de l’environnement et de la biodiversité, de lutte et d’adaptation au changement climatique. Les avancées de ces dernières années ont ainsi montré que l’urbanisme favorable à la santé offre un cadre pour comprendre et se saisir des interrelations entre aménagements, déterminants de santé, état de santé et de l’environnement, et inégalités sociales et territoriales de santé, dans une logique de « système complexe ».
L’urbanisme favorable à la santé est désormais appliqué de façon encourageante et de plus en plus large, avec plusieurs retours d’expérience. Les exemples rapportés témoignent de la nécessité d’une culture partagée entre les acteurs de la santé publique et ceux de l’aménagement mais aussi de la dynamique globale à l’œuvre.
L’urbanisme favorable à la santé : le cas emblématique des villes, particulièrement vulnérables face à l’enjeu climatique…
Plusieurs articles sont consacrés à la santé en zones urbaines, où vivent 55 % de la population mondiale, proportion qui devrait augmenter jusqu’à 68 % d’ici 2050. Les villes sont particulièrement vulnérables aux risques climatiques (événements extrêmes, crise systémique) et environnementaux (pollution de l’air, canicule, bruit…).
…mais des solutions existent
Face à cette situation, il existe des stratégies accessibles et efficaces, favorables en matière de climat, de biodiversité et de santé publique. Les collectivités peuvent agir à condition de développer une volonté forte de collaboration multisectorielle. Pour les élus, les services techniques des communes, les autres acteurs de l’aménagement des territoires, une priorité devrait être de mettre en place des organisations et des processus de décision ad hoc. Ces derniers doivent permettre de traiter de manière concertée les enjeux d’adaptation au changement climatique, de protection de la biodiversité et de santé publique, et de proposer des solutions adaptées au contexte local, créatives, et fondées sur des données probantes.
Quelques exemples d’actions locales mises en place
Des articles rapportent l’expérience de la Communauté urbaine de Dunkerque, qui a rendu gratuits les transports en commun, de Miramas qui démolit et reconstruit un quartier populaire avec les yeux rivés sur la qualité de l’air, l’accès aux soins et aux services sociaux, la cohésion sociale et l’activité physique/alimentation, mais aussi d’autres démarches similaires à Rennes, Grenoble, Echirolles, Villeurbanne, Besançon, ainsi qu’à Lyon et Toulouse avec le témoignage d’urbanistes et de chercheurs.
Des exemples d’actions mises en place à l’étranger
Ce dossier met également en avant l’expérience de cinq villes à l’étranger sur la question de l’urbanisme favorable à la santé : Glasgow (Écosse), La Chaux-de-Fonds (Suisse), Pontevedra (Espagne), Lathi (Finlande) et Sherbrooke (Québec).
Au total, une vingtaine de chercheurs et professionnels de terrain ont contribué à ce numéro, dont l’Organisation mondiale de la santé, et qui montre comment des villes comme Lima (Pérou), Freetown (Sierra Leone) se sont saisies de la question de l’urbanisme comme facteur déterminant des inégalités sociales et territoriales de santé.