Le programme de dépistage organisé du cancer du sein français invite tous les deux ans les femmes de 50 à 74 à effectuer un examen clinique des seins et une mammographie de dépistage. Il propose un bilan diagnostic immédiat en cas de résultats suspect et une deuxième lecture de chaque mammographie normale en première lecture. Le programme a été généralisé à tout le territoire français en 2004. Le dépistage est coordonné au niveau régional par les Centres Régionaux de Coordination de Dépistage des Cancers (CRCDC). Les taux de participation à ce programme, calculés pour les années 2005 à 2019, sont présentés ci-dessous, au niveau national, départemental et régional.
Matériel et méthodes
Le nombre de femmes dépistées est fourni à Santé publique France en février-mars chaque année par les CRCDC selon un questionnaire annuel standardisé. Les données reçues sont agrégées par classes d’âge de 5 ans. La classe 50-54 ans inclut des femmes dépistées qui ont eu 50 ans dans le courant de l’année évaluée, même si elles n’avaient pas atteint cet âge au moment du dépistage ; la classe 70-74 ans inclut des femmes qui avaient 75 ans révolus au moment du dépistage, généralement suite à un retard de réalisation de la mammographie après réception de l’invitation envoyée jusqu’à 74 ans.
Au niveau national et à des fins de comparaison entre régions et départements, les dénominateurs utilisés pour le calcul des taux de participation sont les estimations localisées de population (ELP) de l’Insee. Chaque année, l'Insee estime la population des régions et des départements (France métropolitaine et DROM) à la date du 1er janvier. Ces estimations annuelles de population sont disponibles par sexe, par âge et par département. Les estimations fournies sont établies à partir des derniers recensements de population, de l'exploitation statistique des bulletins d'état civil et de plusieurs autres sources administratives. Elles ont été utilisées pour calculer les populations-cibles du dépistage par tranche d’âge. N’ayant pas de données homogènes dans le temps et dans l’espace, les exclusions du dépistage pour raison médicale ou familiales ne sont pas déduites du dénominateur.
Le taux de participation est calculé pour chaque année civile d’une part et pour chaque période de deux ans d’autre part. En effet, le nombre de femmes dépistées au cours d’une année peut être influencé par les stratégies d’invitation, en particulier dans les premières années de mise en place du programme. Les taux calculés sur deux ans permettent de prendre en compte une période au cours de laquelle toute la population cible devrait avoir été invitée et ainsi reflètent mieux la participation des femmes. En 2004, une partie des départements n'avait pas encore réalisé une année complète d'invitation et certains départements d’outre-mer n’ont mis en place ce programme qu’en 2005. Les résultats sont donc présentés à partir de l’année 2005.
Les taux de participation bruts et standardisés sont présentés. Ils sont calculés par classe d’âge, par département, par région et pour la France entière. Les taux standardisés (sur l’âge en utilisant comme population de référence la population française de 2009, projection Omphale Insee 2007-2042, scénario central) permettent de comparer les territoires entre eux et au cours du temps.
Résultats
Résultats pour la période 2018-2019 et évolution de la participation nationale et par âge
Au cours de l’année 2019, 2 551 000 femmes se sont fait dépistées, ce qui correspond à un taux national de participation de 48,6 % (voir tableau onglet annuels). Pour la période 2018-2019, le taux de participation est de 49,3 % (voir tableau onglet biennals). Tous les taux standardisés annuels et biennaux sont disponibles ici.
La figure montre l’évolution de la participation nationale, tous âges et par tranche d’âge. Après avoir augmenté jusqu’en 2011-2012 pour atteindre un pic à 52,4 %, la participation au programme est en diminution. Les derniers indicateurs de participation, pour la période 2018-2019, indiquent que cette diminution se poursuit lentement. Cette baisse s’observe pour toutes les tranches d’âge et est particulièrement marquée pour les 55-59 ans, chez qui le taux de participation est le plus bas.
Evolution de la participation par région et par département
La figure montre l’évolution de la participation par région de métropole et pour les DROM, les tableaux participation brut 2005-2019 et participation standardisée 2005-2019 donnent les chiffres de la participation annuelle et biennale par région et le tableau (participation tranches d'age 2005-2019) décrit l’évolution de la participation par âge dans chaque région.
La baisse observée au niveau national s’observe également dans la plupart des régions de France métropolitaine, principalement dans celles qui avaient la participation la plus haute, c’est-à-dire Centre-Val de Loire et Pays de la Loire. A l’inverse, elle stagne pour celles qui ont une participation très basse, c’est-à-dire Ile-de-France, Corse et PACA. Dans les DROM, des baisses importantes sont observées, en particulier en Guyane où par exemple la participation en 2019 n’est que de 21,8 %.
Variation géographique de la participation, par région et département
Une conséquence des tendances différentes d’une région à l’autre est que l’hétérogénéité de la participation sur le territoire constatée les années précédentes se réduit sensiblement pour la période 2018-2019, avec des écarts entre régions allant de 35,2 % en Corse et 38,4 % en Ile-de-France, à 56,4 % dans les Pays de la Loire et 57,1 % en Centre-Val de Loire (voir graphique). En Outre-mer, les taux varient de 23,1 % en Guyane à 46,5 % à La Réunion et en Guadeloupe. Cette réduction de l’hétérogénéité géographique s’observe également à l’échelle départementale, avec un gradient Est-Ouest moins marqué que les années précédentes (voir tableau participation brut et participation standardisée et cartes).
Conclusion
Des hypothèses pouvant expliquant la diminution de la participation observée à partir de 2011-2012 incluent la controverse sur les bénéfices et les risques du dépistage du cancer du sein, et une baisse de l’offre en sénologie. Ces hypothèses ainsi que leur impact différentiel d’un territoire à l’autre, en particulier dans ceux où la participation était la plus élevée, devraient être étudiées. Il conviendrait également d’étudier ce qui se passe dans les régions d’Outre-mer.
Il est par ailleurs nécessaire de disposer d’outils permettant de mesurer précisément le recours au dépistage individuel afin (1) de décrire d’éventuels phénomènes de transfert entre dépistage organisé et individuel, et (2) de suivre les tendances globales de recours au dépistage du cancer du sein. Des travaux en cours de finalisation au sein de l’Agence pour estimer le dépistage individuel à partir du SNDS (Système National des Données de Santé) devraient permettre de documenter ces aspects à court-terme mais un codage spécifique de l’acte de dépistage individuel est nécessaire pour en faciliter le repérage.