L’effet préventif des traitements antirétroviraux encore trop méconnu
Une personne séropositive sous traitement avec une charge virale indétectable ne peut pas transmettre le virus, même lors de rapports sexuels non protégés par un préservatif. Cet effet préventif du traitement appelé « TasP » (pour l’acronyme anglais « treatment as prevention ») a été démontré scientifiquement par deux grandes études de cohortes1. Parmi les couples suivis dont l’un des partenaires était séropositif sous traitement et l’autre séronégatif, aucun cas de transmission du virus n’a été observé dans le cadre de ces études.
L’efficacité des traitements antirétroviraux qui permettent aujourd’hui aux personnes séropositives de vivre en bonne santé, avec une espérance de vie identique à celles de personnes séronégatives, sans risque de transmettre le virus, reste méconnue, y compris des populations les plus concernées par le VIH. Ainsi, par exemple, en 2016, dans l’enquête européenne EMIS2 menée auprès d’hommes gays et bisexuels, 41% des répondants ne connaissaient pas l’effet préventif du traitement antirétroviral.
L’importance du dépistage
La prise en charge précoce du plus grand nombre de personnes infectées par le VIH est un enjeu de santé publique de première importance. Connaître son statut sérologique, c’est accéder au plus tôt aux traitements antirétroviraux, qui permettent non seulement de préserver sa santé mais aussi de faire disparaitre la crainte de la transmission du VIH à ses partenaires sexuels.
Selon le Bulletin de santé publique relatif à la surveillance du VIH et des IST bactériennes3, publié à l’occasion du 1er décembre, 6,2 millions de sérologies VIH ont été réalisées en 2019 par les laboratoires de biologie médicale. Si l’activité de dépistage a progressé ces dernières années (+10% entre 2014 et 2018 + 6% entre 2018 et 2019), la pandémie de COVID-19 a entrainé une forte diminution du recours au dépistage de ces infections en 2020. Lors du premier confinement, le nombre de sérologies a diminué de 56% entre février et avril 2020. Il a ré-augmenté en mai et juin, sans atteindre les niveaux observés en début d’année.
Faire connaitre le TASP pour faire changer les regards sur les personnes séropositives
Le 1er décembre est l’occasion de le dire « Vivre avec le VIH, c’est d’abord vivre ». Avec cette signature, la nouvelle campagne de Santé publique France répond à un important enjeu : rappeler qu’aujourd’hui avec les traitements, une personne séropositive peut vivre en bonne santé, vivre pleinement sa sexualité et avoir des enfants.
En rappelant que la séropositivité n’est pas une identité, ni un frein aux relations amoureuses et que les personnes vivant avec le VIH et bénéficiant d’un traitement efficace ne peuvent pas transmettre le virus, cette campagne veut déconstruire les idées reçues pour lutter contre les discriminations dont les personnes séropositives font encore trop souvent l’objet. L’accroche des visuels de la campagne débute par le terme « séropo » et se termine par un adjectif valorisant un autre trait de caractère : poétique, polisson, possessif, etc.
Les différentes enquêtes KABP4 ont montré que d’une manière générale, l’acceptation des personnes vivant avec le VIH diminue avec le degré de proximité : si neuf personnes sur dix accepteraient de travailler en compagnie d’une personne vivant avec le VIH, seule une sur deux accepterait d’avoir des relations sexuelles avec elle en utilisant un préservatif. Par ailleurs, en 2016, 49% des hommes séropositifs ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes ont rapporté des discriminations dans leur vie sexuelle en raison de leur statut sérologique5.
Visible en affichage et sur Internet à partir du 26 novembre et jusqu’au 28 décembre, la campagne est déclinée en 5 visuels mettant en scènes des couples et des familles dans la sphère privée et dans des moments joyeux. Les photos ont été prises sur le vif pour mieux entrer dans le quotidien et l’intimité de ces couples représentés dans leur espace privé.
La campagne met en scène une grande diversité de couples : de même sexe ou de sexe opposé, jeunes ou moins jeunes, représentatifs de la société française. Elle s’adresse ainsi au plus grand nombre avec une attention particulière pour les populations les plus touchées par le VIH (HSH et migrants d’Afrique subsaharienne), ainsi qu’aux personnes séropositives.
En pleine pandémie de COVID-19, il est primordial de continuer à prendre soin de soi. Le dépistage est l’unique moyen d’établir un diagnostic et d’accéder aux traitements antirétroviraux.
1 - Cohen MS, Chen YQ, McCauley M, Gamble T, Hosseinipour MC, Kumarasamy N, et al. Antiretroviral Therapy for the Prevention of HIV-1 Transmission. N Engl J Med. 2016;375(9):830-9.
- Rodger AJ, Cambiano V, Bruun T, Vernazza P, Collins S, Degen O, et al. Risk of HIV transmission through condomless sex in serodifferent gay couples with the HIV-positive partner taking suppressive antiretroviral therapy (PARTNER): final results of a multicentre, prospective, observational study. Lancet. 2019;393(10189):2428-38.
2 Alain T., Villes V., Morel S., Moudachirou K., Annequin M., Delabre R., Michels D., Rojas Castro D., Velter A., European MSM Internet Survey (EMIS 2017). Rapport national de la France, Pantin et Saint-Maurice : AIDES, Coalition PLUS, Santé publique France, en cours de publication, 2021.
3 Florence Lot, Françoise Cazein, Josiane Pillonel, Mathias Bruyand, Ndeindo Ndeikoundam, Delphine Viriot, Gilles Delmas, Cécile Sommen, Etienne Lucas, Stella Laporal, Pierre Pichon, Nathalie Lydié, Didier Che, Bruno Coignard. Bulletin de santé publique - Édition nationale, Santé publique France, décembre 2020.
4 Beltzer N, Saboni L, Sauvage C et Sommen C. Connaissances, attitudes, croyances et comportements face au VIH / sida dans la population générale adulte en Île-de-France en 2010 : Situation en 2010 et 18 ans d’évolution. Rapport ORS Île-de-France, Décembre 2011.
5 AIDES. VIH Hépatites, la face cachée des discriminations. Rapport 2016, 2016.