Notre santé dépend de nombreux facteurs dont certains sont propres à chaque individu (comportement, facteurs génétiques) et d'autres plus largement partagés par une même population. Ainsi, la réduction à des facteurs de risques environnementaux tels que la pollution de l'air, le bruit, ou la chaleur et le développement de facteurs de protection et de promotion de la santé tels que l'activité physique ou la nature en ville sont de nature à protéger et améliorer la santé de la population. Ces actions contribuent également à s'adapter aux changements climatiques, à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à protéger la biodiversité, dans une vision systémique de la santé. L'Évaluation quantitative des impacts sur la santé (ÉQIS) est une méthode formalisée pour illustrer l'influence sur la santé d'un déterminant de santé. L'ÉQIS s'appuie sur l'état de l'art des connaissances scientifiques et sur des données et des scénarios locaux d'évolution des déterminants étudiés. Dans le cadre d'une étude pilote, Santé publique France a réalisé des ÉQIS portant sur l'amélioration de déterminants favorables à la santé (espaces verts urbains, mobilités actives) ou sur la réduction de déterminants défavorables (pollution de l'air, bruit, chaleur), dans trois métropoles françaises. Ce rapport met l'accent sur les principaux résultats obtenus pour la Métropole Européenne de Lille (MEL). L'étude a concerné plus de 1,14 million d'habitants. Pendant la période d'étude (2015-2017), près de 8 300 décès ont été observés en moyenne chaque année dans la métropole chez les personnes de 30 ans et plus. Les résultats de ces ÉQIS soulignent qu'agir sur les espaces verts, les mobilités, la pollution de l'air ou le bruit des transports permettrait d'éviter à chaque fois plusieurs centaines de décès par an (au regard des situations " actuelles "). Ceci représente des bénéfices majeurs pour la santé, qui seraient observés sur l'ensemble du territoire, et pour certains qui seraient plus importants dans les zones plus défavorisées socialement. À titre d'illustration, si tous les Îlots regroupés pour l'information statistique de la MEL avaient le même niveau de végétation que les Iris les plus végétalisés de même densité, 358 décès seraient évités chaque année, soit 4,2 % de la mortalité de la métropole ; si chaque habitant de 30 ans et plus de la MEL faisait en moyenne dix minutes de marche en plus par jour de semaine, on estime que près de 280 décès pourraient être évités chaque année, soit 3,4 % de la mortalité. Dix minutes de vélo en plus par jour de semaine représenteraient 475 décès évités chaque année, soit 5,7 % de la mortalité ; si les niveaux de particules fines (PM2,5) respectaient partout la valeur recommandée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) (5 µg/m3 en moyenne annuelle), 965 décès, soit 11,7 % de la mortalité, seraient évités. Cela permettrait également d'éviter chaque année près de 159 nouveaux accidents vasculaires cérébraux (AVC) (soit 10,3 % des AVC) et 33 nouveaux cancers du poumon (soit 7,3 % des cancers du poumon). Si les niveaux de dioxyde d'azote (NO2) respectaient partout la valeur recommandée par l'OMS (10 µg/m3 en moyenne annuelle), 197 décès, soit 2,4 % de la mortalité, seraient évités. Ceci permettrait également d'éviter près de 220 nouveaux cas d'asthme chez les enfants de 0 à 17 ans, soit 7,9 % des nouveaux cas d'asthme ; si toutes les communes de la MEL respectaient les recommandations de l'OMS pour le bruit routier la nuit (45 dB Lnight), cela permettrait à plus de 11 600 habitants d'avoir moins de fortes perturbations du sommeil ; en moyenne chaque année, la chaleur pendant les jours très chauds (température moyenne ≥19 °C) a été responsable de près de 92 décès prématurés à la MEL. En transformant une information environnementale ou comportementale en impact sur la santé, les ÉQIS constituent un outil intéressant d'aide à la décision pour contribuer à une prise en compte plus systématique de la santé dans les politiques publiques d'aménagement urbain. Les limites méthodologiques qui demeurent et les incertitudes associées ne remettent pas en cause l'importance des bénéfices attendus en transformant les environnements pour les rendre plus favorables à la santé.
Auteur : Pascal Mathilde, Pontiès Valérie, Lagarrigue Robin, Corso Magali, Stempfelet Morgane, Medina Sylvia, Wagner Vérène, De Crouy Chanel Perrine, Blanchard Myriam, Cochet Amandine
Année de publication
: 2024
Pages : 38 p.
Collection : Études et enquêtes