Dans une démarche de promotion de la santé, ce numéro de La Santé en action s’intéresse à la santé globale des migrants en situation de vulnérabilité incluant les déterminants de la santé, l’environnement, la situation socio-économique, l’accès à l’emploi, aux soins, à la prévention, mais aussi les parcours de vie, les traumatismes vécus ou la santé mentale.
Ce numéro fait le point sur les connaissances scientifiques, les pratiques, les dispositifs et les programmes mis en œuvre pour apporter des réponses aux problématiques de santé auxquelles sont confrontés les migrants.
La santé des exilés (immigrés, réfugiés, demandeurs d’asile ou étrangers en situation irrégulière) est généralement meilleure à leur arrivée que celle des nationaux des pays dits d’accueil, mais elle se dégrade rapidement ensuite, en raison des difficultés d’accès aux soins, et surtout du traitement qui leur est fait par la société où ils espéraient fonder une nouvelle vie.
Tel est le constat dressé par Didier Fassin, médecin, sociologue et anthropologue, titulaire de la chaire Santé publique au Collège de France. En remontant plus d’un siècle d’histoire, il interroge cette segmentation d’un domaine particulier de la santé, comme s’il existait une singularité des migrants justifiant qu’on les étudie à part, et démontre que leur santé dépend largement des conditions dans lesquelles ils sont contraints de vivre et de travailler. Il faudrait moins parler de « santé des migrants » que d’inégalités dans les domaines de la santé publique et de la santé au travail, tout en reconnaissant certaines particularités liées à l’expérience dans le pays d’origine et sur le trajet de la migration, laquelle peut être génératrice de conséquences graves sur leur état psychique.
Parcours de vie et de soins des migrants : de multiples inégalités
Les populations en migration portent en effet souvent des blessures invisibles – relevant de la santé non pas physique mais mentale – avec par exemple une prévalence élevée du trouble de stress post-traumatique et de la dépression, encore trop souvent tardivement détectés ou non détectés. Les conditions de vie et d’accueil participent souvent à renforcer le sentiment d’isolement, de perte identitaire et d’incertitude qui les fragilise, quand ils ne font pas l’objet de racisme ou de stigmatisation. Ces populations migrantes en situation de vulnérabilité se trouvent à l’intersection d’inégalités liées aux origines, au genre et à la précarité socio-économique. Elles sont aussi fortement exposées aux violences, comme le notent le Défenseur des droits et la Fondation Abbé-Pierre.
Améliorer les conditions de vie des migrants et donc leur santé
Face à ces situations, des actions et des programmes peuvent être mis en œuvre pour améliorer la santé des migrants en situation de vulnérabilité. Ces actions reposent sur des principes communs à l’intervention auprès de publics vulnérables quels qu’ils soient, notamment la recherche de l’équité, la contextualisation et l’individualisation de la prise en charge.
Il s’agit ainsi d’agir à la fois sur :
- les facteurs systémiques contribuant à la production des situations de vulnérabilité (stéréotypes, préjugés, pratiques de discrimination, difficultés d’accès aux institutions / administrations) ;
- le développement des ressources et des compétences individuelles et collectives (formations et techniques adaptées à l’intention des professionnels, communication en direction des publics, soutien à la participation et empowerment) ;
- les modalités d’interventions auprès des publics en termes de santé.
Au-delà de ces actions d’accompagnement et de prise en charge, l’enjeu est la mise en œuvre d’une véritable politique de promotion de la santé plus inclusive qui permettrait d’agir structurellement sur les déterminants sociaux de la santé (protection maladie, logement, revenus, éducation…) qui ont un impact sur la santé des populations les vulnérables.
Covid-19 : une pandémie qui accroît les inégalités
La situation sanitaire inédite qui touche nombre de pays renforce les inégalités et pèse particulièrement sur les migrants. L’enquête nationale menée sur l’épidémie de la Covid-19, ÉPICoV, pointe ainsi que « les personnes immigrées sont parmi les plus durement touchées par les conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire ».
La visibilité des personnes occupant des emplois précaires (livreurs à vélo, chauffeurs, caissières, femmes de ménage/agents d’entretien) ou non déclarés s’est renforcée sur la voie publique, les transports en commun, les chantiers, tandis que d’autres sont en télétravail. Les étudiants étrangers, dont les visas n’ont pas été renouvelés par les préfectures restées fermées au public, sont également de plus en plus isolés et anxieux, honteux de devoir quémander une aide alimentaire.
Ce constat est partagé au niveau international. « Les immigrés sont exposés à un risque d’infection au moins deux fois plus élevé que les personnes nées dans le pays », note ainsi récent un rapport de l’OCDE.
La Santé en action, Mars 2021, n°455 Migrants en situation de vulnérabilité et santé
En savoir plusUn dispositif de communication spécifique à destination des migrants originaires d’Afrique subsaharienne
Santé publique France met en œuvre depuis plusieurs années des actions de communication à destination des populations originaires d’Afrique subsaharienne francophone vivant en France.
Partenaire de Santé publique France depuis plus de 30 ans, Africa Radio est le média africain le plus développé en France. Le Thème santé de la semaine aborde tous les jeudis un thème différent de prévention comme la vaccination, la tuberculose, le VIH, la nutrition, la dépigmentation de la peau, la contraception, et bien d’autres encore.
L’invité Santé est un dispositif d’animation des réseaux sociaux, en particulier sur Facebook, complémentaire de l’émission radio. Des vidéos courtes sont publiées tous les mardis vers 17h comme un rendez-vous fixe. Elles mettent en scène un invité issu du monde associatif, médical ou expert de Santé publique France et une démarche de prévention. Depuis mars 2020, une mise en scène particulière de nos films Covid a été menée.
Un dispositif spécifique a été réalisé pour la campagne VIH du 1er décembre 2020 avec la conception et la diffusion de spots radios, ainsi que la réalisation de témoignages de personnes séropositives pour publication sur les réseaux sociaux.
Découvrez nos autres ressources et documents dédiés aux populations migrantes
- Livrets de santé bilingues proposés en 15 langues : albanais, anglais, arabe, bengali, chinois mandarin, créole haïtien, dari, espagnol, géorgien, ourdou, portugais, roumain, russe, tamoul, turc. Ils sont téléchargeables et disponibles à la commande pour les professionnels et structures qui accueillent des migrants.
- Supports de communication et de dialogue pour les personnes migrantes et les professionnels de la santé ou du social
- Supports de communication sur l’épidémie actuelle de Covid-19 à destination des populations vulnérables et traduits en différentes langues
- Boite à outils sur l’épidémie actuelle de Covid-19 à destination d’intervenants professionnels, bénévoles et étudiants en santé auprès de publics d'adultes en situation de précarité
Voir aussi
- Articles de la revue La Santé en action
- Articles de la revue BEH