Allaitement et diversification alimentaire du nourrisson : des résultats encourageants
Le manque de données sur l’alimentation du jeune enfant et les recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS) ont conduit Santé publique France à mettre en place un système de surveillance de l’alimentation et de l’état nutritionnel du nourrisson et du jeune enfant pour permettre :
- De décrire les pratiques en matière d’allaitement et de diversification alimentaire
- De contribuer à l’évaluation des politiques de santé publique
- D’orienter les actions de promotion de l’allaitement et les recommandations pour une alimentation plus adéquate du jeune enfant.
L’étude Epifane s’inscrit ainsi dans cette surveillance. Menée une première fois en 2012, Santé publique France publie aujourd’hui les résultats de la deuxième édition menée en 2021.
Les principaux résultats de cette deuxième édition sont encourageants. D’ailleurs, certains objectifs fixés dans le 4ème PNNS 2019-2023 sont atteints :
- Le taux d’enfants allaités à la naissance dépasse désormais l’objectif de 75% fixé par le 4ème PNNS.
- La durée médiane de l’allaitement total (qui comprend l’allaitement exclusif et l’allaitement mixte, c’est-à-dire complété par des substituts de lait maternel) est de 20 semaines vs l’objectif fixé à 17 semaines.
Concernant l’allaitement, Epifane montre que :
- 77% des enfants sont allaités à la maternité (vs 74% lors de la première édition de l’étude en 2012).
- La durée médiane de l’allaitement (exclusif + mixte) a progressé de 15 à 20 semaines sur 2012-2021.
- A 6 mois, plus du tiers des enfants étaient encore allaités en 2021 (vs moins d’un quart en 2012).
A 2 mois, le fait de trouver le biberon plus pratique (y compris le souhait de faire davantage participer le père) et l’insuffisance ressentie de la production de lait maternel (sans que celle-ci ne soit objectivée par une baisse effective de poids du nouveau-né) sont les deux principales causes d’arrêt de l’allaitement (concernant dans les deux cas 76% des mères ayant arrêté). Les problèmes liés à la mise au sein (57%) et les problèmes d’organisation et de manque de temps (54%) sont également invoqués par plus d’une femme sur deux. Ces résultats rappellent l’importance de l’accompagnement des mères par des professionnels bien formés, autant pour l’initiation de l’allaitement que pour sa poursuite.
Concernant la diversification alimentaire, l’étude montre que les recommandations en matière de diversification sont de plus en plus suivies ; mais certains aliments sont introduits plus tardivement que ce qui est recommandé :
- La diversification alimentaire débute dans la fenêtre recommandée, entre 4 et 6 mois, pour 91% des enfants en 2021.
- Seulement 4% des mères ont commencé la diversification avant la période recommandée.
- Quelques aliments restent introduits plus tardivement que recommandé par une partie importante des mères interrogées (matières grasses ajoutées, légumes secs, œufs).
Déroulement de l’enquête
Menée en 2021 auprès de plus de 3 500 mères en France hexagonale, la deuxième édition de l’étude Epifane a été réalisée à partir d’un échantillon de femmes recrutées dans l’Enquête nationale périnatale (ENP).
Les objectifs de l’étude Epifane 2021 sont de décrire l’alimentation des enfants, leur état de santé et de développement, l’état de santé des mères, et leur environnement.
Cette étude permet notamment de décrire :
- La fréquence, la durée et l’exclusivité de l’allaitement ;
- L’utilisation des préparations pour nourrissons du commerce ;
- Les modalités de la diversification alimentaire ;
- Certains indicateurs de la santé post-néonatale (croissance, statut vaccinal, exposition au tabagisme passif…) ;
- Certains indicateurs de l’état de santé des mères, leurs habitudes de vie et leur environnement et leur niveau de littératie en santé (santé mentale, maladie chronique, attachement à l’enfant, consommation d’alcool et tabac, violences au sein du foyer…).
Accroitre la formation des professionnels de santé et clarifier l’information auprès des parents
La deuxième édition de l’étude Epifane montre donc des résultats satisfaisants et une évolution positive en matière d’allaitement et de nutrition chez les jeunes enfants, depuis la première édition en 2012. Néanmoins, la France reste très en retrait en matière d’allaitement par rapport aux autres pays européens, qui se situent pour la plupart au-delà de 80% d’allaitement à la naissance, selon les dernières données disponibles sur le sujet1. L’Irlande, avec moins d’une femme sur deux qui allaite à la sortie de la maternité, est le seul pays européen, avec Chypre et Malte, à afficher des taux d’allaitement inférieurs à ceux de la France.
Les raisons de cette situation défavorable de la France sont probablement multiples, allant de la possible insuffisante durée des congés maternité à l’insuffisante formation des professionnels de santé et des employeurs en matière d’accompagnement des femmes souhaitant allaiter, en passant par l’image peu valorisée de la femme qui allaite et les informations contradictoires reçues sur l’allaitement et l’alimentation du jeune enfant.
De façon globale, les résultats de cette deuxième édition d’Epifane soulignent la nécessité :
- D’accroitre la formation des professionnels de santé susceptibles d’apporter soutien et conseils aux familles et d’informer et former les employeurs ;
- De rendre lisible et cohérente l’information en matière d’allaitement et d’alimentation du jeune enfant auprès des parents ;
- De poursuivre les actions de soutien et d’accompagnement à l’allaitement, notamment auprès des femmes qui initient un allaitement pendant leur séjour à la maternité mais qui l’interrompent très précocement, et de faciliter le recours aux consultantes en lactation.
Santé publique France y participe, en particulier avec la publication et la diffusion de guides sur l’allaitement maternel et sur la diversification alimentaire à destination des jeunes parents et de leur entourage.
De plus, Santé publique France soutient le travail et le déploiement en France de l'Initiative Hôpitaux Amis des Bébés (IHAB), dont le programme a notamment pour objectif d’encourager, soutenir et protéger l’allaitement. Dans ce cadre, l’Agence a aussi contribué à l’évaluation de l'impact du label IHAB sur les taux d'allaitement dans les maternités françaises. En effet, l’IHAB est associée à une amélioration des résultats de l'allaitement dans de nombreux pays tels que le Royaume-Uni et les États-Unis, mais son efficacité n'avait encore jamais été mesurée en France. Les travaux, menés sur des données collectées en 2010, 2016 et 2021, ont montré que le taux d'allaitement exclusif était nettement plus élevé chez les mères accouchant dans des maternités labélisées IHAB. Pour consulter l’intégralité des travaux menés sur ce sujet : The impact of the Baby-Friendly Hospital Initiative on breastfeeding rates at maternity units in France.
Par ailleurs, Santé publique France a mené des travaux sur les pratiques de l’allaitement des femmes de retour au travail en Europe. En effet, les pays de la région Europe de l’OMS présentent le taux d’allaitement exclusif au sein à 6 mois le plus faible au monde, à savoir 25% des nourrissons. Améliorer cette situation pose, entre autres, la question de l’allongement du congé maternité mais aussi du maintien de l’allaitement après la reprise du travail : Comment concilier travail et allaitement ? Quelles sont les caractéristiques de l’emploi ou des emplois favorables à la poursuite de l’allaitement après le retour au travail ? Les réponses à ces questions ont fait l’objet d’une revue de la littérature réalisée par Santé publique France en partenariat avec l’Université de Bordeaux. Ces travaux contribuent à enrichir les connaissances scientifiques dans ce domaine.
Pour en savoir plus :
Alimentation des nourrissons pendant leur première année de vie. Résultats de l’étude Épifane 2021
En savoir plus1 Source : ENP 2016, donnée retenue pour la fixation des objectifs du 4ème PNNS 2019-2023.